Makoto Aida est un artiste d’art contemporain japonais engagé qui alterne œuvres sérieuses et œuvres déjantés/provocatrices avec souvent un propos derrière. Enfant, il a rêvé de devenir dessinateur de manga et en a dessiné un seul une fois adulte : Mutant Hanako.
Avant tout, il est important de prendre du recul sur cette lecture en s’informant sur l’auteur et sa démarche. Pour se faire, les éditions Le Lézard Noir ont eu la bonne idée de proposer une longue et instructive préface expliquant l’œuvre de Makoto Aida, ses diverses expositions et son parcours.
Après cette indispensable préface, nous avons une partie prenant la forme d’un livre d’art où le lecteur peut découvrir un condensé de ce que fait de l’artiste. Il est intéressant de pouvoir découvrir ce que fait le monsieur après avoir lu sur son art, on y découvre des œuvres qui remettent en cause la vision que l’on a du Japon moderne, souvent de manière assez extrêmes mais toujours intéressantes.
Viens ensuite la partie « manga » de l’ouvrage, une histoire de 60 pages en couleurs.

Je n’ai personnellement jamais rien lu de tel, c’est irrévérencieux, inutile, nationaliste, pédophile, gratuit, raciste, voyeur.. bien des émotions viennent à la lecture de cette histoire. Le manga comporte certains aspects qui repoussent le lecteur dans ses limites pour interroger et bousculer mais Makoto Aida va au delà de ça. Il propose une lecture très légère et absurde et pourtant souvent insupportable à lire. Il pousse la violence gratuite dans une extrémité rare.
Hanako est une jeune femme de 12 ans au début de l’histoire. Elle est emportée dans la seconde guerre mondiale face aux États-Unis lorsque sa grande sœur se fait violer sous ses yeux et qu’elle devient elle même le joué sexuel de MacArthur. Elle rêve souvent du grand empereur japonais qui la voit comme une élue qui sauvera le Japon. Après ce rapide pitch, nous avons une histoire assez folle où l’auteur repousse en permanence les limites. On y lit une histoire d’amour avec un jeune kamikaze, un combat de nourriture américaine contre japonaise, des viols à répétitions, la bombe nucléaire, un montre sexe masculin géant et j’en passe..
Malgré tout ces aspects repoussant, le manga se lit rapidement et n’est pas si gratuit que ça. Il interroge sur notre vision du Japon et la relation Japon / États-Unis. Mutant Hanako met également en scène de nombreuses caractéristiques que l’on retrouve souvent en manga : héroïsme exacerbé, sexualisation à l’extrême des jeunes filles (et des uniformes scolaires), violence gratuite, mis en avant d’une culture japonaise qui ne correspond pas forcément à la réalité…
En exacerbant certains aspects de la culture dite « otaku », Makoto Aida semble pointer du doigt les travers de tout un pan de la culture japonaise.

Il est difficile de parler de cette lecture qui engendre des réactions de rejets tant on peut l’interpréter de multiples manières et c’est, je pense le but recherché par l’artiste. Mutant Hanako est une œuvre hybride, complexe à appréhender mais qui ne ressemble à rien de ce que l’on connaît.
Il m’est difficile de recommander une telle lecture mais sachez que cette œuvre ne laisse pas indifférent et propose une expérience unique, pas forcément agréable mais intéressante.
Un grand merci à l’éditeur Le Lézard Noir pour avoir eu le culot de publier une œuvre aussi extrême et dans une très belle édition.
Ps : Cette œuvre est bien évidement réservée à un lectorat adulte et les images présentes ici ne rendent pas compte du caractère violent et explicite du manga.
Mutant Hanako est disponible en 1 volume aux éditions Le lézard Noir.